« Retirado en la paz de estos desiertos,
con pocos, pero doctos libros juntos,
vivo en conversación con los difuntos
y escucho con mis ojos a los muertos.
Si no siempre entendidos, siempre abiertos,
o enmiendan, o fecundan mis asuntos ;
y en músicos callados contrapuntos
al sueño de la vida hablan despiertos.
Las grandes almas que la muerte ausenta,
de injurias de los años, vengadora,
libra, ¡oh gran don Iosef!, docta la emprenta .
En fuga irrevocable huye la hora ;
pero aquélla el mejor cálculo cuenta
que en la lección y estudios nos mejora.
Dans ces déserts et leur paix retiré,
de rares et doctes livres entre les mains,
je vis dans le commerce des défunts,
et de mes yeux j’entends les morts parler.
Sinon compris, sans cesse fréquentés,
ils amendent ou fécondent mes desseins ;
et par muets contrepoints musiciens
au songe de la vie parlent éveillés.
L’imprimerie, Oh grand Joseph, nous rend
les grands esprits effacés par la mort ;
elle venge les injures des ans.
L’heure s’enfuit en fuite sans remords
mais il faut la marquer d’un caillou blanc
celle qui par l’étude rend plus fort. »
Francisco de Quevedo, Desde La Torre in Les Furies et les Peines, Poésie/Gallimard, traduction Jacques Ancet.
(*) et de mes yeux j’entends les morts parler
Illustration : Arnold Böcklin, L’île aux morts, version de Bâle, 1880, source Wikipedia